Les retards de la fusée Ariane 6 deviennent critiques



Ariane 6 ne sera pas prête cette année. Il lui reste à tester le moteur de son étage supérieur et sa compatibilité avec le port spatial de Kourou. L'Agence spatiale européenne promet de s'engager sur un nouveau calendrier en juillet.


Un an de retard, deux, trois, plus ? Le décollage de la fusée européenne Ariane 6, initialement annoncé en 2020, puis reporté à 2022, n'est plus désormais d'actualité avant 2023 ou plus. Selon nos informations, la communauté spatiale s'engagera à la mi-juillet sur un calendrier plus précis sur la situation du futur lanceur européen. Prévenus mercredi 15 juin qu'il n'y avait plus aucune chance d'un vol d'essai cette année , les Etats membres de l'Agence spatiale européenne (ESA) seraient restés stoïques. Depuis l'attaque de la Russie en Ukraine, ils savent qu'il leur faut soutenir ce projet de souveraineté. « On devra gravir la montagne ensemble », insiste-t-on au sein de l'ESA . Il faudra voir les réactions lors des discussions financières en novembre prochain, tout délai entraînant des surcoûts.

Le Covid a expliqué l'an dernier bien des retards. Depuis, l'impression qui se dégage est celle d'un certain immobilisme. Faux, rétorque-t-on à l'Agence spatiale européenne, où l'on souligne que le lanceur a déjà passé un certain nombre de tests importants et fait des progrès. Néanmoins, l'organisation du travail a été revue pour faire travailler ensemble l'industriel ArianeGroup et les agences spatiales, CNES et ESA, afin d'éviter de perdre du temps en rapports, contre-rapports, et les multiples niveaux hiérarchiques.

Retards allemands

Le lanceur serait enfin prêt pour mener les deux essais les plus importants, qui restent à mener, à savoir les tests de mise à feu du moteur Vinci sur le banc allemand de Lampoldshausen en Allemagne et les essais combinés entre le premier étage de la fusée et le nouveau pas de tir 4 du port spatial de Kourou. « On est prêt et dans la ligne finale pour démarrer en Allemagne », promet-on à l'ESA, alors que ces tests auraient dû avoir lieu il y a un an. On est très loin de la culture de SpaceX : toute explosion du moteur et/ou du banc d'essai est exclue.

La bonne nouvelle pour Ariane 6 est que la liste des clients s'allonge. Aussi toute l'équipe travaille déjà sur une hausse des cadences importantes après le premier vol d'essai. Le nombre de satellites des institutions européennes à lancer augmente, tandis que les clients privés, au premier rang desquels la constellation Kuiper , frappent à la porte. Ariane 6 a la chance que nombre de ses concurrents soient aussi en retard, mais si la dérive continue, la fusée risque de voir ses clients fuir ailleurs.

Rappelons que les Etats européens n'ont toujours aucune obligation légale d'appliquer une préférence européenne dans le secteur des lanceurs. Pour certains satellites, la version C de la petite fusée Vega, dont le vol inaugural devrait avoir lieu le 7 juillet, pourrait être une solution de remplacement d'Ariane 6. Mais pour nombre de satellites institutionnels, notamment militaires, ou pour les satellites de la constellation Galileo, Vega C sera trop petite.


Source : LES ECHOS