ArianeGroup prépare déjà l'après-Ariane 6



La filiale d'Airbus et de Safran démarre bientôt les tests combinés entre la fusée et le pas de tir à Kourou, dernière étape avant la mise à feu de la nouvelle fusée Ariane 6. Mais elle plaide déjà pour faire évoluer le lanceur et projette, avec six ans de retard sur SpaceX, un avenir réutilisable pour Ariane 6.


ArianeGroup ne donne toujours pas de date précise pour le lancement inaugural de la fusée Ariane 6. Son président, André-Hubert Roussel, a mentionné « le second semestre de l'année », en précisant que les essais combinés sur le pas de tir de Kourou allaient démarrer en avril.
Avec deux ans de retard sur le calendrier initial, les jours sont désormais comptés. Les étages principaux et supérieurs du futur lanceur européen sont en cours d'assemblage à Kourou.  Au printemps viendra l'épreuve de vérité, avec la campagne de tests en situation réelle sur le pas de tir jusqu'à l'étape finale de l'allumage des boosters. Si les réglages sont mineurs, les équipes pousseront un soupir de soulagement. En cas de complications, le calendrier de lancement pourrait encore dériver, jouant avec les nerfs du milieu spatial européen.


Une montée en cadence critique
Car ArianeGroup n'a plus guère de marge. Les cinq derniers vols de la fusée Ariane 5 sont réservés, avec 4 lancements prévus cette année et un seul tir en réserve, pour l'heure attribué à la mission Juice du CNES, en 2023. Aussi le « ramp up » (la montée en cadence) d'Ariane 6 devra être extrêmement soutenu. « 11 Ariane 6 sont déjà commandées : c'est le seul lanceur à avoir un carnet de commandes déjà aussi rempli avant même son lancement », a souligné le patron  d'ArianeGroup.

Au-delà de la « préparation de l'exploitation industrielle à grande échelle du lanceur lourd », il a décrit un « moment charnière pour le spatial européen ». Selon lui, le transport spatial change d'ère, comme l'aéronautique l'avait fait au sortir de la Seconde guerre mondiale. Les usages du transport spatial se multiplient : télécommunications, surveillance climatique, suivi des catastrophes naturelles, besoin de sécurité et de défense, surveillance de l'espace, sciences, tourisme, exploration humaine… Avant la conférence ministérielle européenne sur l'espace, qui doit se tenir à Toulouse le 16 février, le président d'ArianeGroup a donc plaidé pour « trois grands projets ».

La liste des voeux

ArianeGroup espère ainsi que l'Europe se mettra d'accord pour réaliser une constellation de satellites de télécommunications souveraine, comme le propose le commissaire français Thierry Breton. Une constellation qui nourrirait le carnet de commandes d'Ariane 6.
André-Hubert Roussel reprend aussi à son compte le plaidoyer du président de l'Agence spatiale européenne (ESA) pour les vols habités et demande des financements pour aménager une capsule pour des astronautes européens adaptées à Ariane 6. Enfin, il affirme que l'Europe doit rattraper son retard sur SpaceX dans la maîtrise de la réutilisation des lanceurs.
« Nous devons nous doter de cette technologie sans attendre, dans une logique de coopération européenne », a-t-il plaidé en soulignant que la réutilisation des fusées répond aux besoins de la « logistique spatiale » naissante. Et de rappeler qu'Ariane 6 est bâtie comme un Lego, ce qui laisse envisager une intégration progressive de nouvelles technologies, comme le moteur réutilisable Prometheus, des étages réutilisables ou une capsule pour les vols habités.

Création de Maïa Space

La société annonce donc la création d'une filiale Maïa Space pour développer le petit lanceur réutilisable Maïa. Annoncé en décembre par le ministre français de l'Economie, Bruno Le Maire, il doit être opérationnel en 2026 . Maïa Space s'appuiera sur le savoirfaire des démonstrateurs technologiques en cours de développement, le moteur Prometheus et l'étage réutilisable Themis.
Maïa Space développera en mode start-up le premier mini-lanceur réutilisable en Europe et sera la première fusée de la future famille de lanceurs européens, a en substance expliqué André-Hubert Roussel. Et de promettre un projet « ouvert, qui doit répondre à une ambition européenne ». Pour l'heure, le projet manque encore de substance, alors que nombre de start-up en Europe ont des projets de petits lanceurs. Dans l'immédiat, il s'agit aussi pour ArianeGroup de ne pas passer à côté de la course aux petits lanceurs, rouverte en France par Bruno Le Maire dans le cadre du plan de relance 2030.


Source : Les Echos